La Bonne Etape, à Château-Arnoux, en Provence.
Si chaque star qui a séjourné ici avait une étoile à son nom, ce serait un « walk of fame » in Provence, digne d’Hollywood Boulevard, et si chacun avait laissé l’emprunte de ses mains, se serait un chemin aussi long que celui autour du Palais des Festivals de Cannes.
Depuis Nina Simone, Ray Charles, Art Blackey, Sigourney Weaver, Lucy Liu, Rod Stewart, Simple Minds, Barbara Hendrix, George Clooney, Léo Ferré, Jean Gabin, Jean-Louis Trintignan, Catherine Deneuve, Gérard Depardieu, Juliette Binoche, Cook Robin, Yannick Noah, Jean-Jacques Golman, Michel Petruciani et tellement d’autres, c’est à croire que tout le show business américain et français vient se mettre au vert ici.
L’authenticité d’une famille provençale
Mais que viennent-ils donc chercher ici, eux qui ont tant de choix ? Pourquoi viennent-ils jusqu’en Haute Provence, dans cette vallée de la Durance, dont le cours n’est qu’à huit minutes à pied, ici entre Manosque et Sisteron, dans ce pays des romans de Giono, des cigales et des lavandes ?
L’authenticité et la sérénité, du lieu et de son âme dont la cuisine de Jany Gleize, est un point d’orgue naturel. On l’a compris, c’est le contraire d’un hôtel de chaîne, impersonnel. Il n’est pas même la propriété d’un groupe. Jany Gleize se présente avec charme et malice comme « propriétaire, cuisinier, jardinier et poète ».
La saga d’une propriété familiale vouée à l’accueil
La bâtisse est la propriété familiale depuis quatre générations. Ces pierres ont toujours été vouées à l’accueil des voyageurs. En effet, c’était depuis le XVIIIe siècle un relai de poste, on avait l’obligation d’y offrir le gîte et le couvert aux passagers des diligences, lors des étapes. Avec l’apparition du chemin de fer et la disparition des lignes de diligences, beaucoup de relais de poste ont été transformés en auberges et certaines, comme ici ou comme le Chapeau Rouge à Dijon, existent encore.
Les vignettes des galeries, comme celle ci-dessous, ne montrent qu’une partie de l’image. Avec un PC, pour les visualiser, cliquez sur l’une d’elles puis naviguez à l’aide des flèches.
Un style provençal classique, authentique
Le lieu, dans sa décoration et son ameublement, conserve un style provençal classique authentique sans luxe ostentatoire. Il a une âme. Plafond clair à caissons dans la salle du restaurant, et de poutres vert d’eau et solives roses au bar, plus intime où Amélie flâne pour le plaisir. On trouve même des pépites comme un fauteuil ancien en velours rouge, à dossier inclinable, réglable par les accoudoirs ; sur les murs de sa salle de bains, Amélie admire des fruits sculptés en bas-reliefs… L’hiver, on fait des flambées dans les cheminées. L’ensemble reste modeste, seulement 18 chambres & suites.
On chemine sous la treille dans le jardin fleuri, pour se rendre à la piscine, bien exposée. La température de l’eau convient à Amélie qui y multiplie les longueurs de bassin.
Quatre générations, la cinquième est à pied d’oeuvre
Le nom « La Bonne Etape », raconte les circonstances de la rencontre des parents de Jany Gleize. Son père, Pierre Gleize, confiseur de son état, tombe en panne de moto à Château-Arnoux et y fait la connaissance d’Arlette Rey dont la famille possède l’auberge. Il deviendra chef du restaurant.
Son fils, Jany Gleize donne le ton : « J’habite le pays où le soleil change les couleurs en parfums. Ma cuisine est identifiable claire et nette, elle va à l’essentiel. Je raconte mon histoire, mon pays tel que je le vois, tel que je le rêve, tel que j’aime à le faire partager. Le jardin bio de la Bonne Etape, d’où provient une grande partie des salades, légumes, herbes et fleurs est aussi une source d’inspiration. Une respiration familiale de quatre générations ». La cinquième génération est déjà à pied d’oeuvre, avec Jane, la fille de Jany.
Un chef étoilé sublime les recettes traditionnelles provençales
La cuisine de Jany Gleize n’oublie pas de célébrer sa famille. Il réinvente la tradition des recettes provençales de sa grand-mère Gabrielle. Il est connu pour la soupe d’épeautre, les calamars farcis aux herbes vertes et pignons de pin, le bœuf cru roulé à la poutargue. Les desserts, dont la fameuse crème glacée au miel de lavande servie dans sa ruche, rendent hommage à Pierre, son père, confiseur.
La Bonne Etape est l’un des lieux où l’on peut encore savourer de les cuisines française et provençale traditionnelles, dans une version subtilement mise au goût du jour, plus légère que jadis, inventive. On n’est pas dans la cuisine moléculaire ni l’obsessionnel salé sucré truffé d’emprunts asiatiques dont les effets de mode avaient presque tout submergé.
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Un sommelier talentueux et à l’écoute compose un accord mets-vins riche en découvertes et en valeurs sûres.
On ne peut prendre pleinement conscience de ses racines qu’à condition d’avoir pris de la distance par rapport à celles-ci. Jany Gleize, baccalauréat en poche, est parti faire ses classes chez les plus grands chefs de l’époque, tous des trois étoiles Michelin, rien moins : Jo Rostang, Pierre et Jean Troisgros, Alain Chapel, Michel Guérard.
De retour, il prendra la suite de son père et obtiendra une étoile au Michelin en 1964. Le 14 juillet 1989, il est invité par le président François Mitterrand à préparer le dîner offert à tous les chefs d’états étrangers à l’occasion du bicentenaire de la révolution française.
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Un maestro charmant et charmeur
Jany Gleize, très chaleureux, passe en salle. Le cuisinier des stars est un homme accessible. Il accueille Amélie avec une immense gentillesse. S’il est disponible, il vous accompagne même dans son jardin pas secret du tout.
On ne saurait donc terminer la visite ailleurs que dans le jardin extraordinaire de Jany Gleize, son jardin potager bio, à la fois passion, source d’inspiration et d’approvisionnement. Il l’a baptisé « Jean-Rey » en hommage à son grand-père maternel.
Le jardin extraordinaire du jardinier-poète
Des espaces laissés au repos font le bonheur des lézards, des insectes pollinisateurs et des oiseaux. Ailleurs des variétés oubliées de légumes et de fruits, des plantes aromatiques, des fleurs, se côtoient dans un apparent fouillis, savamment organisé. Le maître de maison explique qu’il a remplacé le bêchage par le grelinage, afin d’aérer la terre sans la retourner.
De petites étiquettes permettent à Amélie de reconnaître les plantes. Légère et court vêtue, à peine chaussée, coiffée d’un chapeau rose à ruban, telle une délicieuse ingénue, elle musarde, de découverte en découverte.